Le CEITEC de Brno
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31 décembre 2022La pédiatrie en crise
La pédiatrie en crise, est-ce vraiment une surprise ?
Ce mercredi 30 Novembre 2022 a été marqué par la communication d’une lettre des professionnels de santé au président de la République pour rappeler la situation extrêmement tendue dans les services de pédiatrie des hôpitaux français accentué par la précocité et l’ampleur de l’épidémie de Bronchiolite. Mais quelles sont les raisons de cette crise ?
Un point sur la situation actuelle :
L’épidémie de Bronchiolite actuelle est d’une ampleur inattendue puisque pendant la seule semaine du 17 au 23 octobre plus de 4300 enfants de moins de 2 ans sont arrivés aux urgences pour 1400 hospitalisations et nous atteignons des pics de contaminations non atteints depuis 10 ans.
La période de Covid ayant largement réduit ses épidémies (comme la grippe par ailleurs), l’hôpital avait été épargné par cet afflux de jeunes enfants en 2020. On peut également avancer l’hypothèse que les organismes ont également perdus l’habitude de lutter contre ce type de virus.
Les médecins faisant face à cette situation doivent gérer l’urgences et ont alerté à plusieurs reprises, dans le courrier du 21 octobre et dans cette lettre au président du 30 novembre 2022 sur la gravité de la situation. Le manque de places en réanimation implique des hospitalisations sur des brancards ou dans les couloirs par manque de lits disponibles. Les enfants peuvent ainsi être intubés dans le couloir. Les pédiatres regrettent des prises en charge des patients trop tardives et des soins précaires. Certains enfants sont renvoyés chez eux faute de place ou transférés dans des régions parfois éloignés de 300 Km de leur domicile.
Mais pourquoi la pédiatrie n’attire plus ?
La situation actuelle trouve sa genèse dans la crise de l’hôpital qui souffre de nombreux postes vacants que ce soit chez les médecins mais aussi chez les infirmières et les aides-soignants. Mais la crise est plus profonde en pédiatrie car en analysant un peu plus en détail, la médecine libérale en pédiatrie est également en crise. Qui n’a pas eu des difficultés à trouver un pédiatre pour son enfant même dans les grandes métropoles.
Nous allons chercher à comprendre en quoi la pédiatrie est en crise ?
Un manque de médecins :
La première raison qui apparait comme une évidence est un manque de praticiens que ce soit dans le milieu hospitalier ou en libéral. Le dernier rapport de l’IGAS datant de 2020 pointe notamment que 8 départements ont une densité de pédiatres libéral inférieure à 1 pour 100 000 habitants. L’âge moyen des praticiens est également inquiétant puisque 44% ont plus de 60 ans ce qui laisse présager des départs massifs dans les années à venir.
Une autre étude de UFC Que choisir indique elle que plus de 25% des enfants de moins de 10 ans vivent à plus de 45 minutes du premier pédiatre.
Cette situation est une conséquence du numerus clausus et on estime que depuis 20 ans seuls 250 médecins ont été formés en internat de pédiatrie alors qu’il en aurait fallu près de 600 ans. Le gap est immense et ne se compensera pas immédiatement avec la fin du numerus clausus décidée en 2021. En effet même si la réforme a permis d’augmenter le nombre d’étudiants en médecine (de 9 300 en 2020 à 11 180 en 2021) ce n’est pas une augmentation exponentielle puisque nos capacités de formation ne sont pas extensibles et la sélection est toujours bien présente.
Un problème d’attractivité :
Une charge de travail importante : cette spécialité impose une charge de permanence importante et une continuité de soins. En hôpital, les gardes effectués la nuit, le week-end ou les jours fériés sont fréquentes et les jeunes étudiants ne sont plus prêts à sacrificier leur vie de famille. On estime qu’il faudra 1,5 jeune pur remplacer un médecin actuellement en poste.
Un manque de reconnaissance : ce point est largement partagé par la profession médicale dans son ensemble mais la pédiatrie a été le parent pauvre des budgets des hôpitaux, les enfants étant parfois jugés moins « rentables ».
Une rémunération peu attractive : l’IGAS dans son rapport relève ainsi que la rémunération des pédiatres en libéral est parmi les plus faibles parmi les autres spécialités et inférieure à celle des médecins libéraux.
Quelles solutions pour sauver la pédiatrie ?
Certaines solutions sont avancées :
- Développer l’exercice des infirmière puéricultrices en ville en lien avec le médecin
- Former les médecins généralistes en santé de l’enfant pour valoriser les compétences spécifiques des pédiatres
- Ajuster le financement des actes des pédiatres de ville pour rendre la spécialité plus intéressante
- Améliorer la coopération en pédiatrie de ville et hospitalière
- Revaloriser les actes pédiatriques médicaux
Il reste également à augmenter le nombre de médecins formés mais les capacités sont limitées. Il existe toutefois des formations reconnues en Europe accueillant des étudiants étrangers et proposant des formations en anglais qui peuvent être des alternatives intéressantes pour les jeunes français désireux de se lancer dans ses professions passionnantes au service des autres.